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gets de la guerre incomparablement plus lourds qu'aux époques où la guerre était l'état normal des peuples entre eux et même chez

eux.

Assez longtemps le risque de guerre a prélevé son tribut en argent et en hommes, prenant l'argent le plus pur et les hommes les plus robustes; assez longtemps la guerre a eu son budget! N'est-il donc pas temps que la paix ait le sien? Le budget de la paix, c'est l'épargne individuelle composant l'épargne collective, c'est l'assurance contre le risque de misère, c'est le décime universel.

Le jour où chacun fera ce que je tente de faire ici, le jour où chacun étudiera le BUDGET DU TRAVAILLEUR avec la conviction que ce budget n'est pas moins essentiel à étudier et à connaître que le BUDGET DE L'ÉTAT, on sera tout surpris de voir quels résultats pourraient s'obtenir, quels prodiges pourraient s'accomplir, si le salaire, étant ce qu'il devrait être, permettait au travailleur, prévoyant et sachant calculer, de contracter l'habitude d'affecter à telle dépense un centime par jour; à telle autre dépense, un autre centime, etc., lesquels centimes seraient centralisés et formeraient, ceux-ci, tel fonds commun pour l'instruction élémentaire ou spéciale des enfants; ceux-là, tel fonds commun pour le douaire des garçons lorsqu'ils seraient en âge de se marier; ceuxlà encore, tel fonds commun pour s'assurer tel avantage ou se donner telle jouissance, etc., etc.

Le rôle que jouent les CENTIMES ADDITIONNELS dans le BUDGET DE L'ÉTAT, on le connaît; non moins important et plus utile serait le rôle que pourraient jouer dans le Budget du travailleur ce que je nommerai les CENTIMES INDIVIDUELS.

Il faut se håter de constituer la puissance du CENTIME CENTRALISÉ, puissance nouvelle, puissance incalculable! Echelle au moyen de laquelle il n'y aurait pas de hauteurs que la civilisation ne pût atteindre, pas de profondeurs qu'elle ne pût visiter! Le DOUAIRE UNIVERSEL et le DÉCIME UNIVERSEL Sont les deux premiers échelons de cette échelle. Ces échelons, on ne saurait trop les multiplier. Plus on les multipliera, moins le bien-être universel exigera d'efforts

individuels pour entrer dans le domaine des problèmes résolus et des faits accomplis.

Dans l'ordre physique il y a de l'air pour tout ce qui respire, dans l'ordre social il y aura du bien-être pour tout ce qui travaille, dès que l'épargne sera devenue une habitude en devenant une science.

Lorsque l'épargne est individuelle, le plus grand nombre se décourage en mesurant la distance qu'il lui faudra franchir du point de départ au but; un petit nombre a seul la force de persistance nécessaire; mais lorsque l'épargne sera collective, comme pour atteindre au même but, il faudra une somme d'efforts infiniment moindre, alors les proportions seront inverses. En matière de prévoyance, ce sera le petit nombre qui fera exception, ce sera le grand nombre qui fera règle.

Présentement on ne consomme pas afin d'épargner et l'on n'épargne pas; alors on épargnera afin de consommer et l'on fera, à la fois, les deux choses: on consommera individuellement et on épargnera collectivement.

Ce ne sera pas seulement à la consommation nécessaire que profitera l'épargne collective; elle profitera aussi à la moralisation publique.

Les travailleurs survivants héritant des travailleurs décédés, ce sera à qui vivra le plus longtemps; conséquemment à qui boira le moins.

L'ivrognerie n'a pas de plus mortelle ennemie que l'épargne. C'est là un fait constaté: il n'y a plus qu'à en tirer toutes les conséquences.

Le lendemain du jour où le travailleur boit moins est la veille du jour où il se nourrira mieux.

Il importe que le travailleur se nourrisse bien, car c'est toujours aux dépens de son travail qu'il se nourrit mal.

S'il a peu de forces, il lui est impossible d'en dépenser beaucoup; s'il en dépense beaucoup et qu'il ne les répare pas, il les a bientôt épuisées; s'il tombe malade, il ne peut plus travailler. Donc il n'y a aucun profit, au contraire, il y a perte, en fin de compte,

pour la société lorsque l'offre, cette fausse loi d'une fausse économie politique, fait baisser le taux du salaire au-dessous de la valeur du travail, valeur ayant pour principal élément la valeur de l'homme.

La santé de l'homme n'est pas et ne doit pas être moins sacrée que sa vie; s'il n'est pas permis d'attenter directement à celle-ci, comment serait-il permis d'y attenter indirectement, en attentant à celle-là?

La santé est au travail ce que le capital est au revenu; la santé du travailleur est son capital; s'il n'est pas permis de lui voler la plus petite pièce de monnaie, comment serait-il permis de lui voler toute sa fortune?

Qui tue et vole ainsi le travailleur peut s'enrichir, mais il appauvrit la société. C'est le cas de dire qu'en empêchant le travailleur de consommer le capitaliste tord le cou à la poule aux œufs d'or.

Mettre, par l'insuffisance du salaire, celui qui travaille dans l'impossibilité de consommer, c'est faire ce que ferait l'enfant qui empêcherait le balancier d'une pendule d'aller de droite à gauche après qu'il aurait été de gauche à droite. Le balancier s'arrêterait. Les deux temps, en sens contraires, veulent être égaux. Ainsi, le droit à la consommation veut être égal à l'effort de production; réciproquement l'effort de production se règle de lui-même sur le droit à la consommation.

L'art de faire produire réside dans le secret de faire consommer. Étre équitable, voilà tout le secret! Etre éclairé, voila tout l'art! Quand on sait cela, quand tout le monde le saura, quand chacun en aura la conviction aussi profonde que me l'ont donnée l'étude et l'observation, toutes les questions de misère, d'épargne, de prévoyance, de bien-être, de civilisation se réduiront à la question de savoir combien le travailleur, sainement nourri, sainement logé, proprement vêtu, se portant bien et travaillant bien, pourra et devra centraliser de centimes?

Est-il une question plus simple et, là encore, n'est-ce pas une question où la politique s'efface pour laisser passer les mathématiques?

Le décime universel, c'est l'épargne collective, sur la plus vaste échelle.

L'épargne collective, c'est l'État en équilibre sur lui-même et n'ayant plus besoin d'être maintenu par un échafaudage de baïonnettes, car c'est la milice de l'ordre soldée par elle-même.

DÉCRET DE L'AVENIR.

TITRE I.

PENSIONS LIBRES.

Il est créé, avec la garantie et sous la direction de l'État, une Caisse de retraites ou rentes viagères pour la vieillesse.

Le capital de ces rentes viagères sera formé par les versements successifs des déposants.

Ces versements successifs étant calculés à raison de 1 CENTIME PAR HEURE DE TRAVAIL, de 10 HEURES PAR JOUR, de 25 JOURS PAR MOIS, de 300 JOURS PAR ANNÉE, pourront avoir lieu par simples multiples de 2 francs 50 c. ou par versement annuel de 30 francs.

Sauf les cas prévus d'infirmités ou d'incapacités de travail contractées dans l'exercice de la profession, le droit à la pension de retraite ne s'ouvrira qu'après le versement intégral de la somme de 900 francs, représentant 90,000 heures, ou trente années de travail.

Le versement intégral pourra être anticipé au gré des déposants, et même, s'ils le veulent, opéré en une seule fois; mais il n'aura pas pour effet d'avancer l'entrée en jouissance de la pension de retraite, fixée à quarante-cinq, cinquante, cinquante-cinq et soixante ans, au choix des déposants.

Les déposants que l'interruption de travail ou toute autre cause aurait empêchés d'effectuer leur versement, soit pendant un mois, soit pendant une année entière, pourront, le mois suivant ou l'année suivante, opérer les versements en retard, sauf à tenir compte

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