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LIVRE NEUVIÈME.

UNIVERSITE

L'AUTONOMIE UNIVERSELLE.

L'homme a été créé droit et juste; c'est lui qui s'est embarrassé dans une foule de questions.

ECCLÉSIASTE.

Il n'y a de vraies révolutions que les révolutions d'idées. JOUFFROY, De la destinée humaine. La destinée humaine donne UNE HEURE par siècle à l'humanité pour se régénérer; CETTE HEURE, c'est une révolution et les hommes la perdent à s'entredéchirer; ils donnent à la vengeance l'heure donnée par Dieu à la régénération et au progrès.

LAMARTINE, Voyage en Orient. Toutes les heures perdues dans l'époque où nous vivons sont une perte irréparable.

LE PREMIER CONSUL au ministre Decrès.

D'où vient que les astres se meuvent en pleine liberté sans se rencontrer ni se heurter jamais? C'est que chacun d'eux se meut dans son orbite sans en pouvoir sortir. Cet ordre astronomique est ce qui constitue l'équilibre universel. C'est un équilibre pareil que j'ai cherché à créer dans l'ordre politique. Pour y parvenir, je me suis appliqué à restituer premièrement à la puissance individuelle sa plénitude; deuxièmement, à la puissance communale son indépen

dance; troisièmement, à la puissance publique son unité; quatrièmement, à la puissance corporative son action; cinquièmement, et enfin à la puissance judiciaire sa suprématie. Chacune de ces puissances se fait contre-poids, mais aucune d'elles n'a de limites autres que celles qui lui sont propres, comme il est propre, selon l'observation de Montesquieu, à tous les rayons d'un cercle d'être égaux entre eux.

Partout où j'ai trouvé une limite arbitraire, je l'ai effacée; partout où j'ai trouvé une limite naturelle, j'ai l'ai conservée. Je n'ai voulu d'aucune pondération factice. L'autonomie universelle : voilà quel a été mon but. L'ai-je atteint? ai-je découvert toutes ses lois? n'en ai-je transgressé aucune? C'est ce qu'à défaut de l'application, que je souhaite sans l'espérer, m'apprendra la discussion que je provoque.

Les huit livres qui précèdent, mûrement médités, ont été rapidement écrits dans l'exil où je suis privé de la plupart de mes notes, patiemment amassées; il n'y faut donc voir que l'imparfaite ébauche d'un tableau dont je me propose de faire l'œuvre de toute ma vie. La pensée fraternelle du lecteur sympathique saura suppléer ce qui manque et rectifier ce qui devra être rectifié. J'ai compté sur elle.

L'expérience de tous les temps et de tous les pays, à l'exception des États-Unis, exception qui s'explique d'elle-même, a démontréce que valaient et ce que duraient les constitutions écrites. Il fallait donc combler cette ornière pour n'y plus verser. Assez et trop de Constitutions ont été tracées sur le papier. Il fallait faire ce que fit le premier homme sensé qui, au lieu de disserter sur le mouvement qu'on niait, marcha. Il fallait faire ce qu'a fait le mécanicien qui, remontant pratiquement des effets aux causes, s'est appliqué à rendre plus rares les explosions originairement si fréquentes des machines à vapeur. Il fallait faire ce que fait l'horloger des mains duquel sortent les plus irréprochables chronomètres; il fallait entreprendre le mécanisme de la liberté; il fallait en construire tous les rouages, en ajuster toutes les pièces. Il fallait, enfin, transporter de la tribune dans l'atelier la liberté et la mettre en œuvres au lieu de la mettre en pa

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