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dans l'eau bouillante ou en touchant à un tison enflammé; il ne s'y expose pas ou ne s'y expose plus.

Relativement aux risques sociaux, toute la question se réduit donc à donner au précepte évangélique la rigueur incontestée d'un axiome géométrique.

Ayant pris pour point de départ de mes travaux les suppositions que je viens d'énoncer sommairement, je me suis demandé s'il était possible de concevoir et de fonder une société qui, réduisant tout mathématiquement à des risques judicieusement prévus et à des probabilités exactement calculées, aurait pour unique pivot l'assurance universelle?

Je me suis demandé si une société fondée sur cette supposition, fausse ou vraie, et tournant sur ce pivot comme la terre tourne sur son axe, vaudrait moins que la société qui repose sur une distinction arbitraire entre le bien et le mal, distinction arbitraire puisqu'elle a varié et qu'elle varie encore selon la diversité des temps et des pays, des religions et des lois?

On remarquera que, respectant toutes les croyances (1), quoiqu'elles se contredisent, je n'attaque aucune des religions qui se pratiquent.

Chacune d'elles affirmant que les autres sont des impostures ou pour le moins des erreurs, dans l'impuissance de les mettre d'accord, j'ai entrepris de me passer d'elles. J'ai éludé ainsi la difficulté que je ne savais comment vaincre.

Je ne dis pas que ce soient elles qui aient tort.

Je ne prétends pas que ce soit moi qui ai raison.

S'il y a un créateur;

Si ce divin créateur est le souverain juge;

Si l'immatérialité de l'âme peut se démontrer;

Si le bien et le mal ne sont pas relatifs d'individu à individu, de nation à nation, de siècle à siècle;

(1) A Calicut, c'est une maxime d'Etat que toutes les religions sont bonnes. MONTESQUIEU, Esprit des lois, l. xxv,

ch. xv.

Si le bien et le mal sont absolus, c'est-à-dire indépendants de l'éducation, du temps et de l'espace;

S'ils ont une sanction éternelle ;

Si cette sanction est le lien d'une vie se rattachant à une autre vie, comme les anneaux d'une chaîne sans fin ;

Mon souhait le plus ardent et ma prière de chaque jour sont que la religion qui est la vérité anéantisse, par l'éclat de l'évidence, toutes les religions qui sont l'erreur; que cette religion soit la loi éternelle et universelle, rendant inutile toute autre loi; que la science succède à l'ignorance en la dissipant comme la clarté du jour dissipe l'obscurité de la nuit; qu'enfin le règne de la justice sur la terre arrive et soit le règne de la paix entre tous les hommes et entre tous les peuples, aucun n'essayant de faire à l'autre ce qu'il ne voudrait pas qu'un autre lui fit.

LIVRE DEUXIÈME.

1

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!

La guerre est un risque.

Ce risque n'existe pas par lui-même comme le risque de naufrage ou d'incendie; il n'existe que parce que l'homme l'a créé.

Il équivaut en moyenne à trois dixièmes de la dépense ordinaire des États (1).

Qu'y a-t-il à faire pour l'écarter et l'anéantir?

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