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S'agit-il de la Caisse des retraites, l'opération peut être réglée par des à peu près certains, si elle embrasse la France entière, et si, opérant sur un grand nombre de déposants, elle applique au calcul de leurs chances un tarif fondé sur la composition des intérêts et sur les lois de la mortalité. L'expérience, en corrigeant les bases de ce tarif, apprendra peu à peu à régler avec précision les droits des déposants et à garantir le trésor public de tout engagement téméraire. DUMAS, ministre du commerce.

Une somme versée pour un enfant de trois ans donnera droit, à l'âge de cinquante-cinq ans, à une pension égale à cette somme.

En consacrant à l'acquisition d'une pension 5 centimes par jour ouvrable depuis 18 ans jusqu'à 50 ans, un travailleur se trouverait avoir économisé au profit de ses héritiers un capital de 495 francs, aurait droit à une pension viagère de 106 fr. 08 c. à partir de 56 ans, ou de 288 fr. 64 c. à partir 60 ans, à son choix.

Pour arriver, à 60 ans, à une rente de 572 fr., il faudrait avoir versé, depuis l'âge de dix-huit ans, une somme de 2 fr. 50 c. par mois, ou 30 fr. chaque année.

Un versement annuel de 10 fr., fait depuis l'àge de 20 ans, donnerait dans le cas d'abandon du capital et d'un intérêt à 4 pour cent, une pension viagère de 167 fr. 42 c.

Le même versement avec restitution du capital et l'intérêt à 5 pour cent donnerait droit à une pension viagère de 464 fr. 17 c.

BENOIST D'AZY, rapporteur.

Si on suppose un versement de 30 fr. par an pour les personnes des deux sexes de 20 à 56 ans, on aura un versement annuel de 450 millions, ce qui revient à l'obligation pour l'Etat d'un emprunt de 450 millions par an. A ce versement annuel, il faut ajouter les intérêts accumulés des versements antérieurs, lesquels produisent une somme énorme. Mais, l'opération pleinement réalisée, voici le capital accumulé dont l'Etat sera devenu dépositaire par les versements successifs, tant des personnes de 20 à 56 ans qui versent sans toucher, que de celles de 56 ans et au-delà qui, ayant versé leur capital entier, n'auront plus qu'à jouir. Il ne sera pas moins de quinze milliards pour les unes, de quinze milliards pour les autres, c'està-dire de trente milliards, somme énorme, effrayante, et dont nous voudrions bien savoir comment l'Etat pourrait se charger. THIERS. Rapporteur de la comm. d'enquête.

Plus d'un père de famille, à son lit de mort, doit aux assurances sur la vie le bonheur ineffable de pouvoir fixer sans angoisses ses derniers regards sur sa femme et sur ses enfants.

Cependant, si on en excepte les assurances maritimes, on ne trouve pas dans nos codes une seule disposition sur cette matière si importante.

C'est en partie au silence de la loi qu'on doit attribuer l'indifférence du public pour une institution aussi utile, aussi morale que celle des assurances sur la vie. L'égoïsme et l'ignorance trouvent une sorte de justification dans le silence du législateur. Ils négligent ce que le législateur paraît avoir méprisé, tant est enracinée chez nous (ne l'oublions pas) l'habitude, bonne ou mauvaise mais constante, de tourner en toutes choses nos regards vers le pouvoir, de le prendre en toutes choses pour agent et pour guide.

ROSSI.

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Le décime universel, c'est la question de l'extinction du paupérisme réduité à sa plus simple expression. Éteindre partout et à jamais la misère, ce n'est qu'une question de DEUX SOUS.

En effet, pour éteindre à jamais et partout la misère, que faut-il? Prélever un centime sur chaque heure de travail, dix centimes par jour, deux francs cinquante centimes par mois, trente francs par an, et pendant trente années, neuf cents francs.

Au moyen de ces versements successifs, centralisés dans une caisse commune, et concourant à toutes les combinaisons que multiplie la mortalité, devenue une science exacte, tout travailleur peut s'assurer contre le risque de misère avec autant de certitude et plus de facilité qu'il ne s'assure présentement en France, moyennant une prime de 1,200 à 1,500 francs, contre le risque du recrutement militaire par la voie du tirage au sort.

S'il contracte, dans l'exercice de sa profession, une infirmité, ou s'il reçoit une blessure équivalant à une incapacité constatée de travail, le cas est prévu, et, dans ce cas, la pension de prévoyance n'en est pas moins légitimement acquise, quoique avant terme, à l'invalide du travail.

L'impuissance de la charité

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charité privée et cha

rité publique est attestée par les siècles.
La charité a fait son temps.

Le temps est venu de l'assurance, assurance individuelle et universelle.

Au lieu de donner, comme on donne communément, inconsidérément, inutilement, un sou, deux sous au pauvre qui mendie, que quiconque fait travailler consente et s'habitue à allouer au travailleur un décime de plus, mais que ce décime soit centralisé, universalisé dans une caisse de retraites pour y servir à la constitution de la pension de prévoyance.

Certes, rien de plus simple, et quoique cela parût petit, rien de plus grand.

Rien de plus grand, car universaliser ainsi l'épargne individuelle, ce serait élever à sa plus haute puissance l'épargne collective.

Ce serait faire de tout travailleur un rentier.

Ce serait faire de tout propriétaire un banquier.

Ce serait créer un monde nouveau à l'inébranlable solidité duquel tous et chacun, petits et grands, concourraient également, comme toutes les pierres, grandes et petites, concourent également à la solidité de la voûte qui doit porter les plus fortes charges, subir les épreuves les plus décisives, traverser les siècles les plus longs.

Ce serait substituer la prévoyance à la compression.

Ce serait mettre la tranquillité publique sous la protection de l'intérêt commun, protection sûre et peu coûteuse, au lieu de la mettre sous la protection de la force armée, protection coûteuse et peu sûre.

Ce serait traiter l'homme en homme, et ne plus traiter l'homme libre en enfant rebelle qu'il faut constamment surveiller et incessamment châtier.

A un acte, en apparence insignifiant : à l'acte de navigation, l'Angleterre est redevable de la suprématie qu'elle a acquise sur toutes les mers du globe.

A une mesure, dénuée, en apparence, de toute grandeur, au décime universel, la démocratie peut devoir son entière libération et son règne définitif, plus sûrement et plus rapidement qu'à des révolutions périodiques.

Toute révolution qui s'accomplit, s'accomplit sur des décombres.

Avant de devenir un bienfait, elle commence par être un désastre.

Avant de sécher la plaie, elle commence par l'envenimer.

Avant de mettre fin aux excès, elle commence par les imiter et quelquefois par les dépasser.

Avant de jeter le câble dans le port, le plus souvent elle brise le navire contre l'écueil.

Sur cent révolutions que le monde porte dans ses entrailles, il y en a dix qui voient le jour; sur dix révolutions qui voient le jour, il n'y en pas une qui naisse viable!

Toute révolution qui n'est pas une révolution d'idées, est un périlleux enfantement, qui se termine par un laborieux avortement.

L'expérience de soixante années atteste qu'il faut se défier autant des révolutions faites au nom du progrès que des guerres faites au nom de la liberté.

La liberté s'établit par la liberté.

Le progrès s'accomplit par le progrès.

L'ouragan est un mauvais moissonneur ; c'est un semeur plus mauvais encore.

Si la démocratie fait bien, si elle a foi beaucoup en elle et un peu en moi, la démocratie renoncera désormais à triompher par la violence et par la destruction; elle procèdera comme procède l'industrie : par la science appliquée et par le progrès continu.

Dans cette dernière voie, on avance lentement, mais on ne recule jamais; dans l'autre voie, on avance rapidement, mais on recule toujours.

Si l'essentiel est d'arriver, il n'y a point à hésiter entre la voie qui mène au but et qui vous y laisse et celle qui ne vous en fait approcher que pour vous en éloigner aussitôt.

La démocratie veut-elle arriver? Veut-elle être le travail, le progrès, la liberté; ou veut-elle être la bataille, la victoire, la révolution? Telle est la question que doit se poser la démocratie, instruite par l'expérience de trois révolutions qui, toutes les trois, ont avorté.

Pourquoi ont-elles avorté toutes les trois ? Parce qu'elles sont arrivées brusquement avant terme, moins comme des effets que comme des accidents, plutôt comme des explosions que comme des solutions, devançant ce qu'elles auraient dû suivre l'instruction populaire et le bien-être universel.

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Moins que jamais, le triomphe définitif de la démocratie est douteux, mais c'est à la condition d'y travailler sans relâche et de l'attendre avec patience. Les gouvernements qui retardent cet avénement agissent comme les gelées qui fécondent les récoltes en retardant les germinations hâtives.

Dans le décime universel, il faut voir un grain semé, grain dont le bien-être universel sera la tige et le suffrage universel l'épi, épi qui, sous la meule, deviendra le pain quotidien de tous les peuples, deviendra la liberté universelle, la liberté sous toutes les formes et à tous les degrés.

Le décime universel s'attaque à la misère individuelle, non dans ses effets qu'il prévient, mais dans sa cause qu'il détruit. Si le problème, tel qu'il le pose, est résolu pour un homme, il sera résolu pour un peuple; s'il est résolu pour un peuple, il sera résolu pour l'humanité tout entière.

De ce problème, voici les termes :

Faire trois parts moyennes de la vie du travailleur ayant atteint l'âge de 60 années;

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Travail. - Repos.

Première part: de 1 à 15 ans : —Éducation. Deuxième part: de 16 à 45 ans : Troisième part: de 46 à 60 ans : Par les trente années de travail, de 16 à 45 ans, assujetties au payement du décime de misère, rembourser à ses enfants l'avance des quinze années d'éducation qu'on a reçue de ses parents, et acquérir, pour le dernier quart de son existenee, le droit au repos.

Mais comme la vie moyenne, en France, n'est que de 36 ans, le plus petit nombre seulement des travailleurs parvenant à l'âge où sonnerait l'heure du droit au repos, ce petit nombre profitant de toutes les chances résultant de la mortalité du nombre le plus grand, le travail héritant ainsi du travail, on conçoit facilement et clairement comment avec la faible retenue de UN CENTIME PAR HEURE DE TRAVAIL, de DEUX FRANCS CINQUANTE CENTIMES PAR MOIS, de TRENTE FRANCS PAR ANNÉE, l'épargne individuelle s'élèverait, par l'épargne collective, à une haute puissance et constituerait de suffisantes pensions de retraites aux invalides du travail.

La vie du travailleur étant ainsi partagée en trois âges, l'âge où il croît et s'instruit, l'âge où il travaille

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