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tard, celle-ci en demande compte à la santé individuelle, à la longévité moyenne, à la reproduction humaine. Cet âge est précisément le plus propice aux travaux intellectuels qui exercent et fortifient la mémoire, développent et forment la raison. La nature, qui jamais ne se trompe, indique donc ici avec certitude ce qu'il y a à faire pendant que le corps est faible, mais que l'esprit est docile, c'est le temps de semer la parole, si l'on veut que le champ soit fertile ét que la récolte soit abondante. « Le champ, c'est le monde, » a dit saint Matthieu*, ce qui signifie qu'on doit l'ensemencer. Mais toute semence, comme toute récolte, a sa saison. Qui laisse passer le temps de l'une ne voit pas arriver le temps de l'autre.

L'expérience démontre que l'adolescent ne doit pas travailler manuellement; car, par suite du perfectionnement sans fin des machines et des instruments, lesquels tendent à économiser de plus en plus la force humaine, l'enfant, s'il travaille prématurément, attendu qu'il produit autant et qu'il consomme moins, devient cause de chômage et d'avilissement du salaire, et, comme à Liverpool et à Manchester, condamne son père à l'inaction, sa mère à la misère.

Cette cause, que j'ai déjà signalée **, n'est encore qu'imparfaitement et peu généralement connue; mais lorsqu'il sera pleinement et manifestement établi que le travail prématuré des enfants et des adolescents est plus nuisible que profitable aux parents, il suffira, pour l'abolir, de laisser s'exercer la liberté de réunion et la liberté d'association : la liberté de réunion, qui démontrera les effets désastreux de ce travail prématuré,

*Chap. XIII, 38.

** L'abolition de la Misère par l'élévation du Salaire. Voir, page 99,

la liberté d'association, qui saura trouver les meilleures bases constitutives, sous le nom de Corporation, de l'assurance contre le chômage et l'insuffisance du salaire.

Ainsi tout s'enchaîne; ainsi tout est alternativement cause et effet, effet et cause; ainsi l'assurance contre l'insuffisance du salaire mène à la nécessité de l'instruction qui, à son tour, mène à l'abolition de la dernière des servitudes : l'assujettissement de la raison humaine aux lois factices, décorées du nom de lois positives pour les distinguer des lois naturelles; ainsi le servage intellectuel, ce servage légal qui a survécu au servage corporel, au servage féodal, disparaît par l'instruction nécessaire, par l'instruction universelle.

LIVRE SIXIÈME.

de la puissance législative et de l'exécutrice... Si elle était jointe a la puissance exécutrice, le juge pourrait avoir la force d'un oppresseur.

MONTESQUIEU. E. des L. Liv. XI, ch. v.

La puissance de juger ne doit pas être donnée à un sénat permanent, mais exercée par des personnes tirées du corps du peuple, comme à Athènes, dans certains temps de l'année, de la manière prescrite par la loi, pour former un tribunal qui ne dure qu'autant que la nécessité le requiert.

De cette façon, la puissance de juger, si terrible parmi les hommes, n'étant attachée ni à un certain état, ni à une certaine profession, devient pour ainsi dire nuisible_et nulle.

E. des L. Liv. XI, ch. vi.

Chaque année, à Rome, le préteur formait une liste ou tableau de ceux qu'il choisissait pour faire les fonctions de juge pendant l'année de sa magistrature, où il prenait le nombre suffisant pour chaque affaire. Cela se pratique à peu près de même en Angleterre, Et ce qui était très favorable à la liberté, c'est que le préteur prenait les juges du consentement des parties.

Ces juges ne décidaient que des questions de fait par exemple, si une somme avait été payée ou non ; si une action avait été commise ou non.

E. des L. Liv. XI, ch. xvI.

Il faut même que les juges soient de la condition de l'accusé, ou ses pairs, pour qu'il ne puisse pas se mettre dans l'esprit qu'il soit tombé entre les mains de gens portés à lui faire violence.

E. des L. Liv. XI, ch. vI.

Au berceau de la monarchie française, les citoyens avaient le droit d'élire leurs juges.

THOURET. Abrégé des révolutions, p. 3. Les républiques anciennes n'avaient pas de lois judiciaires pour punir les crimes et réprimer les violences.

ARISTOTE. Cilé par Vico.

Les peines sèment la guerre et la haine. Soyez donc pleins de miséricorde, comme votre père est plein de misericorde.

Je veux la miséricorde et non point le sacrifice.

Evangile.

En 1427, à Florence, lorsque l'impôt sur le capital y fut établi, toutes les peines corporelles y furent abolies.

EDGAR QUINET.

Détruisez les crimes et conservez les hommes.

THOMAS MORUS,

LA JUSTICE UNIVERSELLE.

I.

ORGANISATION JUDICIAIRE.

La justice humaine, qui tient dans ses mains une balance et un glaive, n'y doit plus tenir qu'une balance. Elle doit peser; elle ne doit plus frapper. L'infaillibilité seule possède ce droit suprême. Or, la justice humaine, qui a condamné Jésus à mourir crucifié, peutelle se croire et se prétendre infaillible? La justice humaine, ce jour-là, n'a-t-elle pas signé à jamais la condamnation de la justice pénale?

Constater le fait, sans même qu'il dût être besoin de le qualifier délit ou crime, c'est punir le coupable, car c'est le vouer, selon l'indulgence ou la rigueur des temps et des pays, au blâme, au mépris ou à l'exécration. La peine ne doit pas aller au-delà ni rester en deçà. Alors le châtiment du crime commis, c'est le crime constaté; le bourreau du criminel, c'est le criminel luimême. Le magistrat reçoit contradictoirement les témoignages contraires et les pèse; dès qu'il les a pesés, sa mission est remplie, son œuvre est terminée; il a constaté le fait, il n'a pas condamné l'homme, L'homme

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