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riens vers le Sahara. « Si l'on admet que le socle primaire de la Meseta marocaine s'est déplacé seulement de quelques kilomètres du Nord vers le Sud, on conçoit qu'il a pu comprimer contre le plateau saharien faisant office de bouclier, les sédiments de l'Atlas qui ont été ainsi plissés et érigés en chaînes de mon tagne » (1). Ce mouvement s'est compliqué d'une composante de l'Est vers l'Ouest, par laquelle les sédiments interposés entre les deux mesetas algérienne et marocaine ont été plissées à leur tour en donnant naissance au Moyen Atlas et c'est la répercussion de ces mouvements tertiaires qui a provoqué, sur les bords du plateau saharien, la formation de collines très étroites, mais très étendues, comme le Djebel Bani.

L'Atlas marocain se compose de trois chaînes de direction S.-O-N.-E une chaîne principale médiane, le Grand-Atlas et deux chaînes secondaires, les Moyen et Petit Atlas, séparées de la première par les importantes vallées longitudinales de l'Oued Moulouya, de l'Oued el Abid et de l'Oued Sous. Le point de soudure de ces différents massifs est encore mal connu. La montagne, aux sommets élevés du côté de l'Atlantique, s'abaisse vers l'Algérie, tandis que ses versants présentent des caractères différents. A l'Est et au Sud où l'érosion des vents a modelé la chaine en formes vives (pentes raides, crètes aigues), le souffle chaud et aride du désert brûle la végétation; l'homme se réfugie alors dans quelque vallée privilégiée où un arroyo intermittent a fait surgir une oasis. Au Nord et à l'Ouest, les formes dues aux eaux courantes sont moins heurtées et plus régulières, tandis que l'influence de la mer se traduit par cette puissance de végétation qui caractérise le diara ou poitrail de l'Atlas.

Portion du système alpin qui formait autrefois une ceinture autour du globe, le Grand ou Haut Atlas s'enfonce à l'Ouest sous l'Atlantique, pour se relever aux Canaries et se poursuit, à l'Est, en Algérie par les monts des Ksour, sous le nom d'Atlas Saharien. Il constitue, par l'importance de son massif, le trait le plus saillant de l'orographie du Maroc. « Grâce à sa haute chaîne dont de nombreux sommets atteignent 3.000 et

(4) L. Gentil. Vue d'ensemble sur le relief du Maroc, page 22.

4.000 mètres, le Haut Atlas marque son empreinte dans la vie sociale de tout le nord-ouest africain; il forme séparation hydrographique et climatérique entre deux zones de civilisation dant l'opposition est très marquée. Il protège le Tell marocain contre le souffle desséchant du sirocco et détourne les vents marins humides de la région saharienne qui commence à son flanc sud; il donne ainsi aux deux provinces climatériques leurs produits caractéristiques (céréales et dattes). Il forme aussi un puissant obstacle au commerce entre les deux régions. Des cols difficiles à franchir le traversent leur hauteur atteint environ 3.600 mètres au sud de la capitale, 1.000-1.500 mètres dans la partie orientale et s'abaisse à 1.200 mètres dans la partie occidentale» (1). Le Grand Atlas se compose de deux chaînes qui paraissent dessiner cinq ou six rangées parallèles de crêtes: l'une, le grand Atlas Occidental commence au Cap Guir et se termine au Tizin-Telouet, l'autre le grand Atlas Oriental s'étend vers l'Est pour se souder à l'Atlas Saharien.

La chaîne occidentale, constituée par des roches paléozoïques qui lui donnent sa structure de muraille déchiquetée aux parois profondément entaillées, comprend deux parties. C'est d'abord une région faiblement élevée, constituée par des schistes et des terrains plus récents, affectant la forme de plateaux. Ces contreforts occidentaux de la grande chaîne, qui s'étendent chez les M'touga et les Ida ou Tanan, entre le Cap Guir et le col des Bibaoun (1.200 m.), séparent les eaux de l'Oued Tensift de celles de l'Oued Sous. Puis se dresse à l'Est une chaîne centrale élevée, mais moins importante par la hauteur de ses sommets et par sa longueur que par l'épaisseur de sa base : elle se présente sous l'aspect d'une crête d'environ 3.000 mètres d'altitude et dentelée en forme de scie. Les indigènes l'appellent Adrar N-deren (2). Elle offre comme principaux culminants la crête d'Ifguig (3.550 m.) avec sa belle aiguille du Tizert (4.000 m.), le djebel Ogdemt (3.600 m.) et le Dj. Ouirzan (3.579) qui dominent la vallée du Goundafi, le Timjourt (4.500 m.) visible de Marrakech, le massif du Likoumt (3.906 m.)

(1) P. Schnell. L'Atlas marocain, trad. A. Bernard, page 49. (2) La Montagne des Montagnes.

aux pics aigus (djebel Amskrine (4.173 m.), pic de Tachdirt), le Dj. Tidili (3.593 m.) et enfin le Djebel Ourika, dont l'altitude oscille entre 3.500 et 4.000 mètres et qui termine la partie occidentale du Grand Atlas, celle qui a été jusqu'à ce jour le plus visitée par les explorateurs. De nombreuses vallées transversales coupent ces montagnes et dans leurs gorges étroites coulent d'innombrables torrents qui alimentent des séries de rivières telles que les Oueds Chichaoua, Bou el Ras, Nfis, affluents du Tensift, l'assif Aït Amer, l'Oued Aneklout, qui se jettent dans l'Océan Atlantique aux environs du Cap Guir, et les Oueds Aït Moussa, el Amdad, Tifnout, dont les eaux viennent grossir l'Oued Sous. Ces torrents que l'on franchit à gué pas plus que les sommets de 2.500 à 3.500 mètres qui dominent les rares pistes muletières ne facilitent pas les communications entre les plaines du Maroc Occidental et le Sud Marocain. Celles-ci ne sont assurées que par quelques cols : les Bibaoun qu'empruntent les caravanes circulant entre Mogador, Marrakech et Taroudant; le Tizi N'test au pied de la Kasbah Goundafa, appelé « col des chats » à cause de la difficulté de son passage, mais qui est la principale route de Marrakech au Ras el Oued; enfin les trois cols du Glaoui, Tichka, Tamanat et surtout Tizi Ntelouet, ce dernier devenu la voie de communication la plus sûre entre le Tell Marocain et le Sahara, depuis que les relations commerciales ont été troublées au Sud de Fès et de Meknès par les Berbères dissidents du Moyen Atlas. Il faut citer aussi le col de TiziMachou (1.743 m.) qu'a emprunté en 1917 la colonne française chargée d'opérer dans le Sous et qui a été aménagé pour permettre le passage des arabas et des canons.

On distingue également deux parties dans le grand Atlas Oriental. La première, qui s'étend jusqu'au Tizi N'telghemt, se distingue nettement de la zone gréseuse méridionale par l'important développement de ses formations calcaires et le redressement de ses couches sous la poussée des roches éruptives récentes. Ses rides jurassiques, qui s'étendent de part et d'autre de l'Ari Aiachi, rappellent avec leurs vals, leurs combes et leurs cluses, la structure de la chaîne du Jura. Cette chaîne est imparfaitement connue; on suppose seulement que l'ensemble du système

se compose << d'une série de chaines étagées s'élevant jusqu'à la chaîne principale, les anticlinaux des crètes étant formés de calcaires fortement plissés et les synclinaux des vallées remplis d'argile rouge schisteuse » (1). Là se révèle toute la puissance de la montagne avec ses Djebel Noukra (3.580 mètres), Tarkeddit, Aouassane (3.704), Sfer etc., que séparent des hautes plaines et qui annoncent la présence du Mont Blanc marocain, l'Ari Aïachi, dont la hauteur reste encore mal évaluée. Son intérêt est considérable au point de vue hydrographique: c'est le grand château d'eau du Sud, le massif de diramation d'où partent cinq grands fleuves la : Moulouya, l'Abid, le Dadès, le Ziz, le Guir, qui coulent vers toutes les directions. A l'Est, la montagne diminue d'altitude pour s'affaisser vers le Tizi N'telghemt, col de 2.182 mètres qui perdra de son importance lorsque la route Meknès Bou Denib permettra des relations directes entre Fès-Meknès et les oasis du Tafilelt (2).

Au delà du Tizi N'telghemt, la chaîne s'abaisse rapidement, apparaissant << comme un long talus brun, à crète uniforme, allant sans cesse en décroissant »; elle constitue la seconde partie du

(1) Schnell, op. cit., p. 132.

(2) « L'aisance extrême avec laquelle on franchit ici (Tizi N'telghemt) le Grand Atlas contraste avec les difficultés que j'ai rencontrées en le passant pour la première fois au Tizi-n-Telouet. Aucun trait de ressemblance, hors l'altitude, n'existe entre l'Atlas des Glaoua et celui-ci. Là une chaîne aux crêtes nues et rocheuses est formée de longs escarpements presque infranchissables; les deux versants, celui du nord surtout, profondément ravinés par l'action des eaux, ont perdu leur forme primitive et se présentent sous l'aspect de contreforts perpendiculaires à l'arête centrale; rocheux, tourmentés, ils cachent dans leurs flancs d'étroites vallées reserrées entre des murailles de roche, seuls refuges de la végétation et de la vie en cette contrée inaccessible, désolée et déserte. Ici, au contraire, le sommet est en partie boisé : on y arrive par un chemin d'une facilité extrême: le massif se compose, non d'innombrables montagnes couvrant tout le pays, avec l'apparence de rameaux perpendiculaires à un tronc, mais d'une série de chaînes parallèles à l'arête principale et séparées entre elles par des plaines qui occupent la plus grande partie de la contrée. Les cours d'eau, auprès desquels les villages sont tantôt nombreux, tantôt clairsemés, s'écoulent au niveau des plaines, traversant les diverses lignes de montagnes par autant de khenegs qui s'y ouvrent comme des portes sur leur passage » de Foucauld, op. cit., P. 233.

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